Comme le mal, personne n'en doute, la beauté est en nous. Elle est dans l'œil qui regarde, dans l'oreille qui écoute autant que dans l'objet admiré. Mais entre lui et nous, il y a des liens obscurs et des rapports secrets. Souvent inattendue et souvent scandaleuse, la beauté, venue de nulle part, nous frappe au cœur avec une violence toujours neuve et toujours répétée. Elle est liée à l'amour. Elle est une promesse de bonheur. À la façon de la joie, elle est une nostalgie d'ailleurs. Elle n'est jamais où elle est. Elle change avec les cultures. Elle évolue avec les époques. Elle varie selon les individus. Elle ne cesse jamais de prendre des formes nouvelles. Elle passe. Et elle renaît.
La beauté est un secret que tout le monde a connu. Elle est très loin d'être recherchée et admirée sans réserve. Les gens sérieux en parlent avec dédain et légèreté. Tout un pan de l'art moderne se moque bien de la beauté et se vanterait plutôt, pour une raison ou pour une autre, de l'ignorer et de la mépriser. Les fous, les grands naïfs, les amants, les poètes attardés, les mathématiciens surtout la cultivent et la vénèrent. Elle est l'espérance même. Elle donne envie de vivre.
Il arrive à des êtres vivants d'être ineptes et très beaux. Il arrive aussi à des femmes laides et à des hommes en dessous du médiocre de rayonner soudain de beauté. Les saints sont toujours beaux. La bonté est belle. Et la vérité, qui peut être si triste, est toujours la beauté même.