mardi 30 juin 2015

Les moments de plaisir sont rares dans la vie


    Je me suis multiplié pour me sentir
     j’ai couché avec tous les sentiments
    rien ne me retient
  
    Sans curiosité
    je me retourne vers le passé

    Que ne donnerais-je pour entendre de quelqu’un la voix humaine


lundi 29 juin 2015

Parfois en certains jours, de lumière Parfaite

Il y a parfois l’indécence de ta beauté 
    qui existe bien que je sois le seul à la voir

    Parce que tu vis malgré moi
    et hors de moi
    peu importe que je m’en souvienne ou pas
  
   Car même si j’accepte que l’on puisse quitter ton corps 
   sans connaître l’exil

    je n’arrive pas à comprendre comment on peut trouver un
    couchant triste


dimanche 28 juin 2015

Hymne à la terre


J'ai découvert le secret de ton rêve dans les prairies, ta sérénité dans les vallées, ta volonté dans les rochers et ton profond et mystérieux silence dans les cavernes... Tu es la langue de l'éternité et ses lèvres, tu es la corde du luth des siècles et leurs doigts, tu es l'idée de la vie et son symbole.



vendredi 26 juin 2015

En chair vive

Me voici au coin du feu, vigilant, dans l'attente de la nouvelle année. J'entends déjà les pétards festifs dans la rue, signe que ça ne va pas tarder. Que nous apportera son mystère impénétrable ? Pour certains la vie, pour d'autres la mort. Serai-je des seconds ou des premiers ? Mais je ne veux pas penser à cela. je chasse de mon esprit cette idée triste. Je joins mon espoir à celui de millions de semblables s'obstinant à ne pas désespérer. Au destin, j'ai déjà fait un pied de nez en maintes occasions, à force de volonté. Pourquoi ne renouvellerais-je pas l'exploit ? L'homme est une autonomie contingente. Sans avoir le dernier mot dans les événements, il les infléchit cependant. Mais il perd ce privilège quand il ne croit plus en lui-même. C'est alors que les dieux ont tous les pouvoirs.




Le livre de l'intranquilité 2

Nous sommes qui nous ne sommes pas, la vie est brève et triste. Le bruit des vagues, la nuit, est celui de la nuit même; et combien l'ont entendu retentir au fond de leur âme, tel l'espoir qui se brise perpétuellement dans l'obscurité, avec un bruit sourd d'écume résonnant dans les profondeurs! 
Combien de larmes pleurées par ceux qui obtenaient, combien de larmes perdues par ceux qui réussissaient ! Et tout cela, durant ma promenade au bord de la mer, est devenu pour moi le secret de la nuit et la confidence de l'abîme. 
Que nous sommes nombreux à vivre, nombreux à nous leurrer! Quelles mers résonnent au fond de nous, dans cette nuit d'exister, sur ces plages que nous nous sentons être, et où déferle l'émotion en marées hautes !



jeudi 25 juin 2015

Rita et le fusil


Entre Rita et mes yeux: un fusil
et celui qui connaît Rita se prosterne
adresse une prière
à la divinité qui rayonne dans ses yeux de miel

moi, j'ai embrassé Rita
quand elle était petite
je me rappelle comment elle se colla contre moi
et de sa plus belle tresse couvrit mon bras
je me rappelle Rita
ainsi qu'un moineau se rappelle son étang
Ah Rita
entre nous, mille oiseaux mille images
d'innombrables rendez-vous
criblés de balles.

Le nom de Rita prenait dans ma bouche un goût de fête
dans mon sang le corps de rita était célébration de noces
deux ans durant, elle a dormi sur mon bras
nous prêtâmes serment autour du plus beau calice
et nous brulâmes
dans le vin des lèvres
et ressuscitâmes

Ah Rita
qu'est-ce qui a pu éloigner mes yeux des tiens
hormis le sommeil
et les nuages de miel
avant que ce fusil ne s'interpose entre nous

il était une fois
Ô silence du crépuscule
au matin, ma lune a émigré, loin
dans les yeux couleur de miel
la ville
a balayé tous les aèdes, et Rita
entre Rita et mes yeux, un fusil.


Les mémoires courtes 18


Car il s’agit bien

De naître
Après tout.
Naître
A contretemps.
Naître
Après son temps.
Naître blanc
Comme l’ivoire
La bougie
Qui consume
L’écran.
Naître noir
Salamandre
Près du cœur
Des diamants
Naître presqu’île
Vagues et continent.
Naître
Une seconde fois
Une dernière fois
La millième
Avant que de parcourir
Les sentiers ardus
Des mille morts
Souffrir la malemort
Naître brillant
Avant que de se coucher
Près de la femme à la faux
Dormir d’un seul œil
Au seuil des tombeaux.
Naître tôt ou tard
Tardillon
Nénuphar
Naître sur un divan
La parole sous le vent.
Mais mon bel amour
C’est auprès de toi
Que je suis né bien souvent
C’est là
Où je nais
Le mieux.
Sans confondre
L’enfant
Et l’amant
Le migrant
Le mutant
Le jusant
Et les perdants


Car il s’agit bien


De naître
Après tout

© Patrick Chemin

Le 23 juin 2015





mercredi 24 juin 2015

Quinzième Poésie verticale

« (…) 
Qu’intercaler alors entre la rose et la lumière,
entre la nuit et l’amour,
entre un homme et la mort,
entre la vie et ce matin transmué en souvenirs ?

Que mettre entre ce qu’est une chose
et cela qu’elle n’est pas,
pour qu’elle puisse l’être ?

Comment tamiser la distance
entre nous et l’absence
pour trouver à la fin notre présence ? »




lundi 22 juin 2015

Portraits abstraits

Nous sommes faits de mille détails dont nous n’avons pas conscience. Que savons nous de ce qui en nous a touché l’autre, a provoqué son amour, et lui que sait il de ce qu’il en est. Ce sera un geste, un mot, une manière d’être, de se taire ou de dire. De révéler sa part d’enfance, d’être attendrissant, sincère. C’est pour cela que je préfère peindre les portraits des gens avec mes mots plutôt qu’avec mes pinceaux ou mon appareil photo. Les mots sont plus précis pour dépeindre ces milliers de facettes, ces petits riens qui sont les trésors de chaque être. Il y a aussi l’inexplicable, ce qui ne peut se décrire, l’invisible, l’indicible, l’alchimie entre deux êtres, à un moment donné. Ce moment peut être long ou court, durer toute une vie, durer l’éternité, ou être fugace comme la vie d’un papillon. Mais la somme de tout cela fait de nous ce que nous sommes. 



Représentation du monde, abstrait ou surréaliste, la peinture a mille visages ,elle est pour nous un moyen de nous évader ,de laisser libre cours a notre imagination ~

Alphabet (E)

                         En présence
de la lumière, et toutefois hors d’elle, de la fenêtre haute, l’Ange du monde
entier
 qui d’une voix d’azur et d’or, sur le seuil de ce jour
et de l’espace libre, annonce les cieux, les campagnes, les mers, les étendues,
les peuples et les déserts, proclame et représente le reste et le Tout, affirme
toutes ces choses qui sont en ce moment même et qui sont comme si elles
n’étaient point ; en présence de mes mains, de mes puissances, de mes
faiblesses, de mes modèles, et hors d’eux ; distinct de mes jugements,
également éloigné de tous les mots et de toutes les formes, séparé de mon nom
dépouillé de mon histoire, je ne suis que pouvoir et
silence, je ne fais point partie de ce qui est éclairé par le soleil, et mes
ténèbres ne m’appartiennent point. Mon
silence m’assiste ; mon abstention est plénitude. Comme le poing fermé et
durci contient la diversité des actes, ainsi je me ressens et je me vois. Le
total de mes paroles est muet ; la puissance d’exprimer, dans toute sa
force se résume et se nie en moi. Dans un état de possession si concentrée,
plus générale que la vie qui la supporte, mon âme édifiée au-dessus des êtres
et des idées par les vertus du corps reposé, se sent égale en existence à tout
ce monde visible et possible qui la presse d’une multitude d’images du soleil
et l’obsède de tant de signes de mouvement
 Même le groupe caché de ses opérations, même le secret
sentiment de ses chances infinies lui semblent tout distincts d’elle-même. Mon
esprit pense à mon esprit et mes yeux considèrent ma main
        Je songe à la quantité des usages et des actes de cette
main qui sont innombrables pour nous, et peu variés quant à elle... O moment,
je ne suis que détails hors de toi, je ne suis qu’un fragment de ce que je
puis, je ne suis que moi hors de toi ! Bel instant, balcon du
temps, tu supportes au moyen d’un homme un regard d’univers, une parcelle de ce
qui est contre toute chose. Je respire sur toi une puissance
indéfinissable, comme la puissance qui est dans l’air avant l’orage



samedi 20 juin 2015

La Nouvelle Justine

Mais la philosophie, Justine, n’est point l’art de consoler les faibles ; elle n’a d’autre but que de donner de la justesse à l’esprit et d’en déraciner les préjugés. Je ne suis point consolant, moi, Justine ; je suis vrai. .


Une mallette d'échantillons


Il y avait, rangés à l’intérieur de ces cinq doigts et de cette paume comme dans une mallette d'échantillons, tout ce que je voulais et tout ce que je devais savoir de la vie. C'est elle qui m'apprit, en me prenant la main, qu'il existait bel et bien un lieu de plénitude au cœur même de la réalité . ~

 Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil


Intermède : la vérité est dans le doigt

Lorsque le Sage montre la lune, l’imbécile regarde le doigt. (Proverbe chinois.)  
 Lorsque le Sage explique que son doigt n’a aucune importance et que c’est la lune qui est intéressante, l’imbécile écoute le Sage et trouve qu’il parle vraiment bien. (Variante moderne de ce proverbe.)
   Lorsque le Sage exige de l’imbécile qu’il regarde cette « bon sang de lune », l’imbécile a peur mais ne lève pas la tête. (Variante très moderne de ce proverbe.)  
 Lorsque le Sage finalement renonce à parler de la lune, et lance la conversation sur son doigt qui après tout semble intéresser l’imbécile, ce dernier se dit que le Sage est un homme qui sait se faire comprendre et parler de tous les sujets, même les plus incongrus. Comme les doigts. (Variante encore plus moderne dudit proverbe.)
 Lorsque le Sage est mort, l’imbécile se demande : « Mais au fait, de quoi voulait bien nous parler le Sage quand il dressait le doigt si haut au-dessus de sa tête ? » (Variante définitive dudit proverbe.



Les chemins des hommes

Les hommes marchent par des chemins divers. Qui les suit et les compare verra naître d’étranges figures ; figures qui semblent appartenir à cette grande écriture, que l’on rencontre sur la coque des œufs, sur les ailes des oiseaux, dans les ombres des nuages, dans les pattes de l’araignée, à l’intérieur et à l’extérieur des montagnes, des galets, des plantes, des animaux et des hommes, dans les limailles qui entourent l’aimant, et aussi dans les étranges conjonctures du hasard. 


vendredi 19 juin 2015

JE CONNAIS DES BATEAUX



Je connais des bateaux qui restent dans le port
de peur que les courants les entraînent trop fort,
Je connais des bateaux qui rouillent dans le port,
à ne jamais risquer une voile au dehors.
Je connais des bateaux qui oublient de partir
ils ont peur de la mer à force de vieillir,
et les vagues, jamais ne les ont séparés,
leur voyage est fini avant de commencer.
Je connais des bateaux tellement enchaînés
qu’ils en ont désappris comment se regarder,
Je connais des bateaux qui restent à clapoter,
pour être vraiment sûrs de ne pas se quitter
Je connais des bateaux qui s’en vont deux par deux,
affronter le gros temps quand l’orage est sur eux,
Je connais des bateaux qui s’égratignent un peu,
sur les routes océanes où les mènent leurs jeux.
Je connais des bateaux qui n’ont jamais fini
de s’épouser encore chaque jour de leur vie,
et qui ne craignent pas, parfois, de s’éloigner,
l’un de l’autre un moment, pour mieux se retrouver.
Je connais des bateaux qui reviennent au port,
labourés de partout mais plus graves et plus forts,
Je connais des bateaux étrangement pareils,
quand ils ont partagé des années de soleil.
Je connais des bateaux qui reviennent d’amour,
quand ils ont navigué jusqu’à leur dernier jour,
sans jamais replier leurs ailes de géants,
parce qu’ils ont le cœur à taille d’océan.



jeudi 18 juin 2015

LE JARDINIER D’AMOUR

Vous marchiez sur le sentier du bord du ruisseau.
Et la cruche sur votre hanche était pleine.
Pourquoi, vivement, avez-vous tourné la tête et
M’avez-vous regardé à travers votre long voile flottant ?
Ce brillant regard échappé de la nuit vint vers moi,
Comme une brise qui après avoir fait frissonner l’eau
se perd dans les ombres du rivage.
Ce regard vint à moi comme l’oiseau du soir qui,
rapidement, vole à travers la chambre obscure, et d’une
fenêtre ouverte à l’autre s’en va dans la nuit.
Vous avez disparu comme une étoile
derrière les collines, et j’ai passé sur la route.
Mais pourquoi vous êtes-vous arrêtée un instant et
m’avez-vous regardé sous votre voile pendant que
vous marchiez sur le sentier du bord du ruisseau
avec sur la hanche votre cruche pleine ?



mercredi 17 juin 2015

Libres mais on l'est pas

Les hommes sont libres. Ou ils se croient libres. Ils sont, en vérité, si étroitement maintenus dans un fragment dérisoire de l'espace et dans leur époque d'où il leur est interdit de s'échapper que leur fameuse liberté, dont ils font si grand cas, n'est que trompe-l'œil et illusion.


liberte freedom cheval horse painting dessin drawing

mardi 16 juin 2015

La beauté

La beauté est une rencontre 
 Mais nous ramassons le caillou Sur le chemin
 Le tenant à peine dans la main 
Puis sans y penser le jetons plus loin 
Pendant que le couchant 
Effleurant le mont
S’attarde un bref instant 
Puis sans se retourner va son chemin



Diptyque avec une ombre



La cloche qui sonne. Ici. Ailleurs. Le chat derrière le grillage. Le râteau. Je tends la main. Elle se perd. Comment la retrouver ? Mouches et oiseaux ponctuent l’instant. Le jour me regarde tant que j’en perds mon regard. Ce que je dis, je ne le comprends pas. Mais ce que je ne comprends pas me dit. Ce qu’on appelle dire. Je me tais, je parle. Ou l’inverse. Je suis perdu même quand je me trouve. La vie n’est pas son nom. J’essaye de lui en donner un pour qu’elle puisse se reconnaître. Sans se voir. Elle serait là. Je serais là. Nous nous regarderions. Sans nous voir puisque de l’une à l’autre, plus de distance. Des nuages, une ombre sur le mur. Brun rouge, un insecte me court sur la main. L’infini travail des cellules, le vertige de l’électron. Les mots sont toujours en avance –– ou en retard. Jamais à l’heure.



 Ligne espace temps

Autoportrait au radiateur

Devant ce qui te blessait le plus, tu commençais par éclater de rire. Tu n’es plus là mais j’ai
retenu ta leçon, aujourd’hui je l’écris ainsi :
« Dans ce qui prétend nous ruiner, grandit notre trésor. »  

 Une obsession, une seule obsession, tenace, infatigable, une obsession profonde, insistante,
incurable : c’est avec ça qu’on fait un écrivain — ou un fou. Mon obsession à moi, têtue, inusable, c’est la vision d’une femme auprès de ses enfants. Cette scène, sans doute la plus répandue dans le monde, me mène immédiatement sur les terres mélangées de la bêtise et de l’adoration. Je veux bien cette bêtise. J’abandonne la grande intelligence ornée, je l’échange dans l’instant contre cette bêtise adorante, lumineuse. Pourquoi un tel spectacle me bouleverse-t-il autant, je l’ignore. Je sais seulement que c’est dans cette bêtise que je trouve la plus claire santé avec la plus grande joie. Un visage, une parole, une feuille d’arbre peuvent certes me conduire également dans ces zones où le barrage de la conscience éclate, délivrant les eaux du ravissement. Mais ce visage, cette parole ou
cette feuille ne sont alors que des figures secondes, dérivées : il y a toujours quelque chose de maternel dans ce qui me trouble — une manière que la vie a de veiller sur la vie faible.   Dans la cuisine, des roses minuscules, adorables. Deux sont en grande conversation,
appuyées l’une sur l’autre. 

Quand je quitte l’appartement, je les regarde et j’ai la sensation de partir en laissant la lumière.




lundi 15 juin 2015

Noces de Sable (I-II)

Tu m’as créée pour un amour démesuré. Pourquoi mon âme demeure-t-elle dans un corps si fragile ? Obscure et douloureuse cette passion d’inquiétude et démentielle l’exaltation dans laquelle elle me maintient.
II
Tu as fui sous ce ciel tellement clair que je ne sais toujours pas s’il était le premier ou le dernier du monde. Tu n’as pas eu le courage de regarder l’appel de mes yeux. Tu t’étais tourné vers le chemin que tu avais déjà choisi et qui t’éloignait de moi à jamais. Je suis restée seule et immobile sous le soleil, cherchant à capturer la trace de ton ombre et j’ai murmuré dans ta langue les mots de soumission.


dimanche 14 juin 2015

Le nu perdu

Nous ne sommes pas une franche volonté, mais l’instrument dévié d’une volonté perfide interposée entre l’obscurité et nous, entre la vigueur, le désir et le loyal terme solaire.
Un jour, maudit entre tous, le prêt devint propriété et le don lieu de ruines.
Il ne faut pas offrir la fleur au fruit. A bout d’espoir, il s’y glisserait.
La parole dépourvue de sens annonce toujours un bouleversement prochain. Nous l’avons appris. Elle en était le miroir anticipé.
La terre, ses brouillons de fortune, l’infini, l’indéfini, une impropre souveraineté, l’amour inséparable de ses meurtriers, se consument ensemble et en nous. L’ombre du temps couvre ce secret.
J’ai vécu dehors, exposé à toutes sortes d’intempéries. L’heure est venue pour moi de rentrer, ô rire d’ardoise! dans un livre ou dans la mort.

Image  Michèle Victor 


L'homme joie

Partons de ce bleu, si vous voulez bien. Partons de ce bleu dans le matin fraîchi d'avril. Il avait la douceur du velours et l'éclat d'une larme. J'aimerais vous écrire une lettre où il n'y aurait que ce bleu. Elle serait semblable à ce papier plié en quatre qui enveloppe les diamants dans le quartier des joailliers à Anvers, ou Rotterdam, un papier blanc comme une chemise de mariage, avec à l'intérieur des grains de sel angéliques, une fortune de Petit Poucet, des diamants comme des larmes de nouveau-né. "


vendredi 12 juin 2015

Ocean


Il est au creux de la vague, vague qui elle-même est au creux de l'océan, océan qui lui-même est au creux de l'Univers, il y a de quoi se sentir perdu.


mercredi 10 juin 2015

Petites Proses

. .
 Cette nuit, je sens contre mon corps endormi des frôlements d’ailes, des battements furtifs. Je dis : il y a des oiseaux dans mon lit. Des oiseaux ou des chauves-souris. Une voix répond : non, ce sont les âmes des morts du cimetière. Depuis des siècles, elles attendent par milliers derrière le mur.
 . . .
 J’ai bien dormi, car mon malheur a dormi lui aussi. Sans doute a-t-il passé la nuit couché en boule sur la descente de lit. Je me suis réveillé avant lui, et j’ai eu quelques secondes de bonheur indicible. J’étais le premier homme ouvrant les yeux sur le premier matin. Puis mon malheur s’est réveillé à son tour, et aussitôt il s’est jeté sur moi et m’a mordu au foie



Alphabet (B)

Bouleversant les ombres et la couche, ramassé, détendu ; divisant, rejetant les flots du linceul vague, l’être enfin se défait de leur désordre tendre . La vertu d’être Soi le parcourt. Être Soi le saisit comme une surprise ; et parfois heureuse surprise, parfois un immense malheur. Que de réveils voudraient n’être que rêves !... Mais sur-le-champ l’unité s’empare des membres, et de la nuque jusqu’aux pieds un événement se fait homme. Debout ! crie tout mon corps, il faut rompre avec l’impossible !... Debout ! Le miracle d’être debout s’accomplit. Quoi de plus simple, quoi de plus inexplicable que ce
 prodige, Equilibre ? Surgis, maintenant, marche, rejoins tes desseins dans l’espace ; suis tes regards qui ont pris leur vol dans ce qu’on voit ; pénètre, avec des pas que l’on peut compter, dans la sphère des lumières et des actes, et compose tes forces à des objets qui te résistent... Et toi, je t’abandonne quelque temps, Douceur de n’être pas ! J’oublierai le sommeil jusqu’à la nuit. A ce soir, jeux obscurs, monstres, scènes impures, et vous, vaines amours !... Je me dépouille maintenant de mon état
 inconnaissable. O qui me dira comment au travers de l’inexistence ma personne tout entière s’est conservée, et quelle chose m’a porté inerte, plein de vie et chargé d’esprit, d’un bord à l’autre du néant ? Comment se peut-il que l’on ose s’endormir ? Quelle confiance dans la fidélité de mon corps, dans le calme de la nuit, dans l’ordre et la constance du monde !... Ce soir, tu reviendras, Absence ! Vous régnerez derechef dans quelques heures, effrayante impuissance inconnue, faiblesse essentielle, charme invincible qui enchaînes les yeux fermés à leurs images... On ne peut pas se retourner, engagés dans la gangue du sommeil, pour prendre sur le fait le Singe qui montre les Songes 



 

Le jardin du prophète


“ La mer nous mène une fois encore sur ces rivages. Nous ne sommes qu’une de ses vagues. Elle nous envoie proclamer son message, mais comment y parviendrions-nous à moins de briser la symétrie de notre cœur sur les rochers et le sable ?
Car telle est la loi des marins et de la mer : si l’on désire la liberté, il faut absolument s’enfoncer dans les brumes. L’informe cherche éternellement une forme, de même que les innombrables nébuleuses aspirent à devenir soleils et lunes ; et nous qui, formes rigides, avons beaucoup cherché et rentrons à présent sur cette île, nous devons redevenir brume une fois encore et tout réapprendre depuis le début. Et qui pourra vivre et s’élever vers les hauteurs à moins d’être brisé par l’amour et la liberté ?
Nous serons éternellement en quête de rivages, afin de pouvoir chanter et être entendus. Mais qu’advient-il de la vague qui se brise où nulle oreille ne peut l’entendre ? C’est ce qui n’a pas été entendu en nous qui entretient nos peines les plus profondes. Et pourtant, c’est cela aussi qui donne forme à notre âme et façonne notre destinée. ”


lundi 8 juin 2015

la fille de papier

“Les liens se font et se défont, c'est la vie. Un matin, l'un reste et l'autre part, sans que l'on sache toujours pourquoi. Je ne peux pas tout donner à l'autre avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête. Je ne veux pas bâtir ma vie sur les sentiments parce que les sentiments changent. Ils sont fragiles et incertains. Tu les crois profonds et ils sont soumis à une jupe qui passe, à un sourire enjôleur. Je fais de la musique parce que la musique ne partira jamais de ma vie. J'aime les livres, parce que les livres seront toujours là. Et puis… des gens qui s'aiment pour la vie, moi, je n'en connais pas.”


dimanche 7 juin 2015

Âmes jumelles

Il arrive que deux âmes se rencontrent pour n’en former plus qu’une. Elles dépendent alors à jamais l’une de l’autre. Elles sont indissociables et n’auront de cesse de se retrouver, de vie en vie. Si au cours d’une de ces existences terrestres une moitié venait à se dissocier de l’autre, à rompre le serment qui les lie, les deux âmes s’éteindraient aussitôt. L’une ne peut continuer son voyage sans l’autre.


samedi 6 juin 2015

La dolce Vita



J’ai l’impression de n’avoir jamais fait que des films sur les femmes. Je me sens complètement à leur merci, je ne me sens bien qu’avec elles : elles sont mythe, mystère, différence, fascination, désir de connaissance, regard pour se voir soi-même.




Dualité


Ne recherche pas les complications extérieures,
Ne séjourne pas dans le vide du dedans;
Sois serein dans l'unité des choses,
Et la dualité s'effacera de toi.



Les étoiles

Les gens ont des étoiles qui ne sont pas les mêmes.
Pour les uns, qui voyagent, les étoiles sont des guides,
pour d’autres, elles ne sont rien que de petites lumières.
Pour d’autres qui sont savants, elles sont des problèmes…

                      Mais toutes ces étoiles-là se taisent.
                               
Toi, tu auras des étoiles comme personne n’en a…
               Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j’habiterai dans l’une d’elles,
puisque je rirai dans l’une d’elles,
   Alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles.

                  Toi, tu auras des étoiles qui savent rire ! »


jeudi 4 juin 2015

Les illusions

Les illusions nous rendent le service de nous épargner des sentiments pénibles et de nous permettre d'éprouver à leur place des sentiments de satisfaction. Aussi devons-nous nous attendre à ce qu'elles en viennent un jour à se heurter contre la réalité, et le mieux que nous ayons à faire, c'est d'accepter leur destruction sans plaintes ni récriminations.